Réflexion sur l'enseignement de l'art et le beau par Gustave Courbet

L'origine du monde, 1866

Je ne puis enseigner mon art, ni l'art d'une école quelconque, puisque je nie l'enseignement de l'art, ou que je prétends, en d'autres termes, que l'art est tout individuel, et n'est pour chaque artiste, que le talent résultant de sa propre inspiration et de ses propres études sur la tradition. ... Aucune époque ne saurait être reproduite que par ses propres artistes, je veux dire les artistes qui ont vécu en elle.
Je tiens les artistes d'un siècle pour radicalement incompétents à reproduire les choses d'un siècle précédent ou futur, autrement dit à peindre le passé ou l'avenir. C'est en ce sens que je nie l'art historique appliqué au passé....

Je tiens à dire aussi que la peinture est un art essentiellement concret et ne peut consister que dans la représentation des choses réelles et existantes. C'est une langue tout physique, qui se compose, pour moi, de tous les objets visibles, un objet abstrait, non visible, non existant, n'est pas du domaine de la peinture. L'imagination en art consiste à savoir trouver l'expression la plus complète d'une chose existante, mais jamais à supposer ou à créer cette chose même.



Le chêne de Flagey, 1864

 Le beau est dans la nature, et se rencontre dans la réalité sous les formes les plus diverses.... le beau donné par la nature est supérieur à toutes les conventions de l'artiste. Le beau, comme la vérité, est une chose relative au temps où l'on vit et à l'individu apte à le concevoir. L'expression du beau est en raison directe de la puissance de perception acquise par l'artiste. Avec de pareilles idées, concevoir le projet d'ouvrir une école pour y enseigner les principes de convention, ce serait rentrer dans des données incomplètes et banales qui ont jusqu'ici dirigé partout l'art moderne.
...

Jusqu'ici, l'art national n'a jamais existé. Il n'y eut que des tentatives individuelles et des exercices d'art imitant le passé. Quand je serai mort, il faudra qu'on dise de moi: celui-là n'a jamais appartenu à aucune école, à aucune église, à aucune institution, à aucune académie, surtout à aucun régime, si ce n'est le régime de la liberté.
Gustave Courbet

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